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Le blog de Maroudiji

Les grands enjeux de société et les idées qui en font la trame, avec humour, passion et gravité.

Karna, incontournable héros du Mahabharata

Le secret de Kunti : l'enfant abandonné

Les deux femmes de Pandu : Kunti et Madri

Le roi Pandu, fils du grand sage Vyasa ( l'auteur et acteur du Mahabharata), était le père officiel, mais non biologique, de ceux qu'on nomma par la suite les cinq Pandava. En fait, ces enfants furent conçus par des dieux à travers les deux femmes de Pandu, Kunti et Madri, avec son assentiment enthousiaste. Ainsi, sa descendance et la direction du royaume seraient assurées. C'était le devoir temporel et spirituel le plus important pour une homme de son rang d'avoir une descendance pour lui offrir et continuer le rituel du shrada, la cérémonie destinée aux ancêtres, qu'il faut pratiquer dès le décès, avec zèle et gravité, sinon peine et chagrin seront le lot de l'âme départie.

En effet, Kunti détenait un secret. Avant son mariage, elle reçut d’un sage la bénédiction de faire apparaître devant elle, grâce à un mantra, le dieu qu’elle souhaitait. Naturellement, et sans trop y croire, un jour, elle essaya son efficacité. Puisqu'elle avait invoqué Surya, le dieu du Soleil, il se présenta à elle. Elle ne réalisait pas qu’une telle invocation, comme le lui apprendra Surya, surtout venant d’une aussi jolie fille, avait pour implication une relation sexuelle ; c’était pour cette raison qu’il se présentait à elle. Scandalisée, Kunti refusa catégoriquement, prétextant l'impossibilité, par la suite, de trouver un mari. Surya la rassura : les dieux ne procréent pas comme les humains ; elle aura un enfant sans les marques de l’accouplement ; elle restera vierge.

Ainsi, son premier fils, Karna, naquit. Confuse, elle l’abandonna. comment aurait-elle pu expliquer cette aventure sans encourir le scepticisme de la part de sa famille et du peuple ? Rapidement, elle le plaça dans une corbeille et pria pour que le courant de la rivière l'emporte vers un lieu qui lui portera bonheur. L’enfant possédait à la naissance des caractéristiques surnaturelles, il était sorti de son sein avec des parures sur le corps, tels que boucles d'oreilles et bracelets. Ces atouts naturels le rendraient tout puissant et prouvaient son origine divine. Grâce à ces ornements, et les bijoux qu'elle plaça, en plus, dans le panier, pour dédommager celui qui l'adoptera, un jour, pensa-t-elle, elle le retrouvera.

Avec une vidéo sur la vie de Karna, en anglais, seulement.

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Karna, le guerrier malchanceux
Karna et Kunti-Mahabharata

Une des grandes figures héroïques du Mahabharata est l’incontournable Karna. Les Hindous d’aujourd’hui, en grand nombre, l’adorent ; ils ne jurent que par lui. Abandonné à sa naissance de sa mère la princesse Kunti, à part Krishna et deux ou trois sages, nul ne connaît ses origines. Elles seront gardées scrupuleusement secrètes jusqu’à la fin précoce de la vie de Karna. Mais ce guerrier dans l’âme, venu au monde avec tous les signes distinctifs d’une personnalité exceptionnelle, s’avère animé d'une force prodigieuse et l’égal d’Arjuna au combat et en beauté physique. Seul contre tous, contre le système, en l’occurrence les classes sociales, sinon contre son destin tragique, Karna est un homme blessé qui cherche désespérément sa place.

Jeune, il avait approché le plus grand instructeur en art martial et en dharma de son temps, Parasurama. Mais pour recevoir l’initiation, il lui ment quant à ses origines. (Parasurama ne divulguait pas son savoir aux ksatriyas.) À la fin de l’enseignement, le maître s’aperçut de la malhonnêteté de son disciple et s’en froissa. Pour ce mensonge, son étudiant ne pourra pas jouir des pouvoirs qu’il a appris quand l’occasion cruciale se fera sentir ; il ne se souviendra plus des mantras pour invoquer les armes formidables.

Le prince Duryodhane avait tout de suite vu en Karna, dès le premier jour, un allié inestimable et un adversaire digne des Pandava. Son intuition ne le trompera pas. Karna demeurera son ami fidèle, contre vents et marées, jusqu'à la dernière minute de sa vie. Le moment venu, alors que la guerre fait rage, il sera tué par Arjuna. La manière dont il a été assassiné, avec l’aide de Krishna, est un grand sujet de discorde parmi les admirateurs du Mahabharata.

Krishna essayant de ramener Duryodhane à la raison pour éviter la guerreTout le monde sait, cependant, que Duryodhane a l’esprit mal tourné et que son fond, son âme, son être tout entier est envahi par quelque influence démoniaque. D’ailleurs, cette occurrence s’est faite jour dès sa naissance, quand les sages présents demandèrent à ses parents de se débarrasser de l’enfant qui allait causer la perte de la dynastie. Ils ne les écoutèrent pas.

Beaucoup plus tard, lors d’un jeu de dés pipé (bonjour le dharma) qui consistait à déchoir de leur position les Pandava, véritables héritiers du trône, trône qu’ils étaient prêts cependant à partager avec leurs cousins, ces derniers, après les avoir injustement dépossédés de leurs biens, voulurent se moquer d’eux, publiquement, en déshabillant leur femme, Draupadi, à la vue de tous, agissant comme le chien à la queue coupée qui n’a aucune gêne à exposer son derrière.

Les démons ( asuras ) sont tellement sûrs d’eux qu’ils se croient tout permis et se conduisent comme des lâches. En position de force, ils pensent que la supériorité peut faire fi des lois du karma, de la morale et de la bienséance, et ainsi ils humilient, insultent, frappent et volent ceux qui se trouvent sur leur chemin, ceux qui sont en position d’infériorité.

Et ils trouvent cela normal de détruire, piller et massacrer les plus faibles pour accroître leur territoire ! Ils vous disent que c’est la loi du plus fort qui est juste, pas le dharma…
Tiré de la BD Gengis Khan de Denis-Pierre Filippi, Manuel Garcia, & Marie Favereau

Et ils trouvent cela comme allant de soi que de détruire, piller et massacrer les plus faibles pour accroître leur territoire et leurs richesses ! Ils vous disent que c’est la loi du plus fort qui est juste, non le dharma… Nos ancêtres ont agi ainsi, continuent-ils, et nous sommes fiers d’eux, nous sommes fiers de la civilisation qui est née de ces violences diaboliques ! Il faut voir le bon côté des choses et non seulement les destructions et les horreurs. Elles font certes partie du monde ; mais elles ne sont pas le monde. Il faut aller de l’avant, le futur attend l’Homme nouveau.

Mais ici, dans cette scène du Mahabharata, c’est Karna le grand, celui qui est adoré de nos jours par des millions d’Indiens, celui qu’ils considèrent supérieur à Arjuna, physiquement et moralement, et bien c’est ce Karna qui va inciter ses compères à humilier cette immense femme, Draupadi, la plus belle d'entre toutes. Il va exiger qu’on lui retire son sari et qu'elle reste là, toute nue, au milieu de l’assemblée ; il désire qu’elle soit dorénavant considérée comme une servante ( genre esclave, catégorie dont nous sommes plus accoutumée ) et, pourquoi pas, une fille de joie…

Karna insiste pour mettre toute nue Draupadi, la femme des Pandava

Ces guerriers présents, au côté du roi, qui se moquent du dharma et des bonnes manières, ( et qui ont des millions d’admirateurs, certainement plus nombreux aujourd’hui qu’avant ), ne réussiront pas à mettre ce plan honteux à exécution. Mais cette séquence du jeu de dés dans la sabha est la goutte qui fait déborder le vase et conduira les Kuru à leur destruction totale par la guerre.

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Et plus encore sur Karna ici :

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